Après une, trop courte, nuit de sommeil et un bon petit déjeuner, nous revoilà dans notre bus, en route en pour Tam Coc et Hoa-Lu.
Mais avant, petit surprise car n’écrite dans le programme de l’agence : nous allons au Centre de l'Artisanat sur Laque, sur la rue Nguyen Khanh Toan dans le quartier Cau Giay du nord-ouest de Hanoi. Là, il y a un petit atelier où on nous explique, démonstrations pratiques à l’appui, les divers procédés de fabrication des laques, mais surtout il y a un très beau magasin de présentation.
Sans entrer dans les détails de cette technique artisanale que je connaissais déjà depuis mes séjours en Chine, (d’où d’ailleurs elle a été ‘importée’) je tiens à dire que ce magasin m’a vraiment impressionné: je ne sais pas ce que font maintenant les chinois, mais les Viets ont commencé à reproduire sur laque des peintures occidentales célèbres. Le résultat est étonnamment beau et nous n’avons pas pu résister à la tentation : nous avons acheté (entre autres babioles) une belle Adèle de Klimt, laquée. Bref, quand la responsable en communication du magasin nous a dit que le tableau sera envoyé par avion directement à notre hôtel de Saigon et qu’il n’y a pas des problèmes pour le transport en avion au retour en France (50x70 cm, tout de même, auxquels s’ajoute l’emballage…) nous avons dit chiche et sorti la carte bancaire… Bon, maintenant je n’ai aucune idée, peut être sur e-bay sinon amazone, je trouverais le même à moitié prix, mais je n’aurais pas le souvenir de l’aventure du Vietnam, du transport, avec les discutions à l’aéroport de Saigon pour le faire passer en « marchandise fragile », ou à Roissy, pour le retrouver, etc… Sinon, tout est bien quand ça fini bien et maintenant Adèle trône majestueuse au-dessus de notre table à manger, en illuminant le séjour. Qu’est-ce que ça doit être quand on possède l’original, hein ?!
Une fois cette visite terminée, nous avons repris la route en direction de Ninh Binh. Et là, la grande surprise: une nouvelle et tout à fait inattendue ville, à mille lieux du vieux centre médiéval ou des maisons coloniales : on ne peut même pas s’imaginer d’être encore à Hanoi ! Ici les grattes ciel dévorent les rizières est écrasent les pagodes et les temples, contrastant d’une manière dramatique avec les vieux KTT des années ’50 encore debout dans le voisinage, ces Khu tap thé, « unités d’habitations collectives » de type soviétique dans lesquelles, même au jour d’aujourd’hui, les « fonctionnaires », policiers, militaires et autres piliers du régime habitent !
Je sais maintenant que Hanoi a plus de 100 gratte-ciels de plus de 100 mètres de hauteur , dont l’énorme tour Keangnam, que voici que voilà dans une des photos ci-dessous, qui domine pour le moment (car une autre tour, plus grande encore, est déjà en construction) avec ses 70 étages, 3 sous-sols et 336 m de hauteur, dans le quartier Nam Tu Liem du sud de la ville que, justement, nous sommes en train de traverser!
Je ne sais pas quoi dire ! D’une certaine manière, ça m’a fait plaisir pour les Vietnamiens, car après tant d’années de guerres et tant des destructions, la façon dont leur pays évolue aujourd’hui c’est encore une autre belle preuve de leur force morale, leur esprit pragmatique, leur intelligence et leurs capacités d'adaptation!
C’est aussi la preuve que la politique d’ouverture économique a donné ses fruits, la croissance est en marche et cette croissance n’est pas seulement une boule immobilière comme dans beaucoup d’autres pays, car aujourd’hui le Vietnam, le second producteur mondial de café, le troisième exportateur de riz et le 3e producteur de pétrole d’Asie, est en train de devenir un vrai nouveau dragon asiatique…
D’autre part, en ce qui concerne Hanoi, j’ai peur qu’il va perdre son identité, va ressembler à Shanghai, ou à Qatar, ou pire…pour ne pas parler des conséquences dramatiques de ces constructions sur la population, car, comme le pays est encore communiste, le pouvoir n’a pas de mal à utiliser les terres comme bon lui semble. Ainsi, à propos de ces nouvelles constructions sorties de terre au milieu des rizières, j’ai appris qu’en 2008, ils ont décidé que plusieurs provinces, districts et communes seraient absorbés par Hanoï! Et quid des paysans et autres habitants, leurs maisons, leurs jardins et leurs tombes?
Mais nous n’avons pas le temps de penser au sort des Vietnamiens et de leur capitale, car nous sortons de Hanoi et de ces nouveaux quartiers et nous continuons le voyage sur la route nationale QL1A, une sorte d'autoroute à 2x2 voies séparées par une barrière centrale en béton. Enfin, nous allons voir de plus près à quoi ça ressemble « la campagne » vietnamienne, même si ce n’est que par la fenêtre de notre autobus !
Nous traversons des villages avec des maisons alignées au bord de la route, ressemblant aux maisons tube qu’on a pu voir à Hanoi, même les villas des nouveaux riches, reconnaissables à cause de leurs décorations kitch (comme partout dans le monde) ont la même allure tubulaire, le guide nous explique le pourquoi de la taxe foncière Co. (voir détail concernant l’habitat sur le net) mais il y a plus que ça, tout un style d’architecture spécifique des maisons traditionnelles au Vietnam.
Nous traversons un paysage de rizières de plaines inondées et de cultures maraîchères, les parcelles cultivées sont bien délimitées, avec les légumes en rangs, sagement alignés, apparemment sans aucune mauvaise herbe…. Des serres, des élevages de volailles, dans les champs des buffles et des vaches (rouges) en train de pâtre entre les tombes. Car ici les tombes sont en plein champs, parfois même dans des rizières, isolées ou plus ou moins regroupées, leur orientation étant, parait-il, soigneusement choisi par des géomanciens en fonctions de la date de naissance du mort et de son horoscope.
Et il y a aussi des églises, beaucoup des églises dans ce nord de Vietnam, il me semble, en tout cas mon photographe de mari, car c’était lui, avec son super-appareil, qui, assis à la fenêtre, photographiait sans cesse et c’était quand même bizarre de voir ces bâtiments, certains en style gothique, avec la croix érigée au-dessus de ce paysage…
Comme héritage de la colonisation, à part les églises, il faut souligner aussi la ligne ferroviaire Đường sắt Bắc Nam construite pas les colons en 1930 et que nous avons traversés après le passage du train. Et je remarque aussi le fait que le guide a ténu à nous dire que le train et pratiquement le même qu’à l’époque, c’est-à-dire, la même ligne, la même vitesse, etc… Comme quoi, les Vietnamiens reconnaissent quand même l’apport français dans leur pays !
Après quelques 70 km parcourus en approximatif deux heures (pas étonnant, vu la circulation, plus ou moins chaotique), nous nous arrêtons au restaurant Hoang Duc pour un très bon déjeuner, précédé d’un très drôle atelier de cuisine, où nous avons cuisiné nous-même les boulettes de chèvre de notre repas !
Les ventres bien (trop ?) remplis, nous partons vers Tam Coc et « la baie d'Ha Long terrestre ». Vous ne savais pas de quoi il s’agit ? Moi non plus, même si c’était surtout pour la Baie d’Ha Long que j’étais là, à vrai dire… Mais terrestre, je n’en ai jamais entendu parler et pourtant, elle est fameuse et même inscrite dans le Patrimoine mondial de l'UNESCO.
Alors, le premier contact a été vraiment une surprise.
En fait Tam Coc est une petite partie de Trang An, un complexe paysager, culturel et écotouristique de 2160 hectares, entouré par une zone tampon de 6,268ha, qui contient trois zones protégées : L’ancienne citadelle de Hoa Lu – La zone historique; Le complexe paysager de Trang An - Tam Coc - Bich Dong et la forêt primaire d’usage spécial de Hoa Lu...
Le complexe se trouve dans une région tropicale et humide du sud de Hanoi, une région montagneuse envahie et retravaillée par la mer plusieurs fois dans le passé géologique récent, d’où des étranges formations rocheuses, ces pitons karstiques, dont certaines immergés, jaillissant au milieu des rivières et des rizières.
L’ensemble des montagnes de Tràng An abrite plus de 50 grottes reliant 30 petites vallées qui se succèdent sur environ 10 km dans une forêt primaire, d’une grande diversité de flore et de faune, dixit wikipedia.
Quant à notre objectif immédiat, c’est une promenade vers les trois grottes de Tam Coc, le bien nommé (car Tam = triangle), une zone touristique tellement célèbre que son nom est utilisé pour désigner toute le secteur, même si là il y a beaucoup plus que trois grottes.
Pour ce faire, nous allons à l’embarcadère Ben Thuyen où, un peu mal assurés, nous embarquons sur un petit sampan pour une croisière sur la rivière Ngo Dong, qui traverse en zigzag non seulement des petits bois et des rizières, encadrés de falaises abruptes, presque verticales, mais aussi et surtout les trois grottes, c’est à dire Hang Ca, 127 m, Hang Giua 70 m et Hang Cuoi, 45m de long.
Ça je le dis maintenant, après que j’ai visité les lieux et que j’ai lu sur internet les détails, mais quand je suis monté dans la petite embarcation conduite par une rameuse, je n’avais aucune idée de ce que nous attendait. Et même, je dois l’avouer, je ne menais pas large, en voyant les manœuvres que faisait la bonne femme avec ses pieds (car elles rament avec les pieds, ces gens-là) et en pensant à nos poids, assez conséquents. D’ailleurs, quelques minutes après le départ, mon mari a commencé lui aussi à ramer, de façon plus orthodoxe tout de même, et je pense que la deuxième paire des rames était dans la barque précisément dans ce but.
En tout cas, mon inquiétude n’a pas duré longtemps, car le magnifique paysage me mettais déjà pleins les yeux, avec ses pitons rocheux, les sommets couverts d’une dense végétation, sortant des terres des deux côtés de la pleine verdoyante traversée par la rivière,
Pour parfaire la magie de ce cadre somptueux, à un moment donné nous étions absolument seuls sur la rivière, entourés d’une nature si luxuriante qu’on se serait cru dans le « Monde Perdu » de Conan Doyle, avec les buffles et les cochons noirs en liberté sur les berges, en guise d’animaux préhistoriques pas du tout intéressés par notre passage …
Et la petite barque pataugeant dans cette eau paisible, presque stagnante, tellement limpide qu’on pouvait voir les vallisnéries et les élodées au fond, entre les fleurs des derniers lotus qui s’épanouissaient sous le soleil de fin de l’été… Et le silence absolu, interrompue de temps en temps de bruit des pagayes dans l’eau…
Et devant nous un imposant éperon rocheux traversant la rivière d’une part à l’autre, de plus en plus près, de plus en plus grand, avec une fente au niveau du sol, whouu.. c’est l’entrée dans la première grotte et on va entrer par-là ? Ben oui, et le plafond est si bas qu’il faut se pencher fortement dans le canot pour éviter la belle stalagmite au milieu, et il fait noir à l’intérieur, mais je dois faire confiance à la mémé rameuse, elle doit connaitre l’endroit, hein ? Enfin, nous sortons de ce noir complet et continuons à travers une vallée encore plus belle vers la deuxième grotte, Hang Hai (hai= deux et hang… grotte) qui n’est qu’à quelques mètres de là. Après ça, il faut parcourir un bon kilomètre pour arriver à la troisième grotte, la plus grande.Là le plafond est haut, avec des belles stalagmites et même des petits chauves-souris que notre rameuse se fait un devoir de nous montrer, en les éclairants avec sa torche électrique. Seul bémol, le nombre des barques que nous avons maintenant rattrapé et que les rameuses et les rameurs (car oui, il y a aussi des rameurs) manœuvrent adroitement d’un point de vue à l’autre, dans un slalom improbable, vaguement désordonné et assez périlleux.
J’ai adoré cet endroit et je n’arrive pas à croire quelle chance nous avons eu de choisir un voyage qui le propose dans son programme ! Et là je me dis combien d’endroits comme celui-ci doivent y être encore et que je n’aurais plus jamais l’occasion de voir ! Mais au moins j’aurais eu un petit aperçu, c’est déjà ça, pas vrai ?
Une fois payé le bakchich recommandé par le guide à notre gentille rameuse, nous reprenons le bus pour aller vers la commune de Truong Yen visiter les vestiges de « la citadelle de Hoa Lu », ancienne capitale de Vietnam entre 968 et 1010, dont 12 ans sous la dynastie des Dinh et 29 ans sous les Lê. Pendant le trajet le guide nous raconte leurs histoire que je ne vais pas répéter ici, car tout le monde connais l’œuvre de Shakespeare, qui regorge d’histoires semblables, on est tous pareils, peu importe le méridien…
De nos jours, de tous ces temples et palais qui ont fait la renommée de la capitale du royaume à l’époque, ils n’en restent que deux temples, construites au XVII siècles par les habitants sur le terrain du palais principal de l’ancienne citadelle. Certains objets antiques sont encore bien conservés comme le trône en pierre devant le sanctuaire, les bas-reliefs en bois, les statues des rois Dinh en bois laqués et les deux pavillons de culte dédiés à ces deux empereurs.
Le plus grand, le plus beau et déjà restauré, car les paysans ont, parait-il leurs préférences tenaces, est celui consacré au culte du roi Dinh Tien Hoang, construite en respectant les principes du Feng shui, avec le fleuve Sao Khe devant, la montagne Ma Yen comme paravent et la montagne Long Trieu en arrière, dans le style de l'architecture "noi cong, ngoai quoc", c’est-à-dire le temple comme le caractère chinois du mot "Cong" (工), entouré des murs comme le caractère chinois (国) du mot "Quoc".
On entre dans le temple par la Porte d’Honneur extérieure (Nghi Mon ngoai), on traverse une cour bordée des basins (même un paysan y est à la pèche, lol), comme toujours il y a encore une porte et encore une cour avec des arbres fruitiers et des plantes ornementales et enfin deux grandes colonnes en pierres coiffées des belles lanternes sculptées, permettant le passage vers la cour principale et le sanctuaire. Au milieu de cette cour, le trône royal en pierre verte monolithe, sculpté de dragons et deux autres animaux fabuleux appelés nghe, qui ressemblent à des chiens et de chaque côté des belles statues des chevaux blancs symbolisant l’armée et des lionceaux, en pierre verte monolithe, symbolisant la dévotion pour le roi Dinh ...
À l’intérieur, sous une belle charpente laquée rouge posée sur des piliers en bois de fer, on retrouve la statue du roi Dinh en majesté qui regarde loin devant, entourée de celles de ses fils, Dinh Hang Lang et Dinh Toan à droite et le fils ainé Dinh Lien à gauche. Plus toute une collection d’armes et autres objets anciens.
Le toit du temple est lui aussi remarquable, avec ses tuiles rouges en forme de coquilles de saint jacques, que je remarque ici pour la première fois.
Nous sortons de l’enceinte du temple pour affronter de nouveau la foule des colporteuses qui s’accrochent pour nous vendre, entre autres, des photos que nous n’avons jamais demandées. Finalement ce n’est pas le plus « faible » c’est-à-dire mon mari, qui achète, mais moi, en pensant que ça pourrait faire plaisir à ma belle-mère, ce que ça a été le cas, pardi !
Par contre, mon mari a été fasciné par le buffle « commercial », car si j’ai bien compris des histoires des autres voyageurs, ce paysan que voici avec son buffle trainé quelques temps auparavant dans la boue pour plus d’authenticité, est là tout l’année, pour attirer les touristes. Le buffle c’est son fonds de commerce, même peut être que les paysans viennent chacun à son tour « présenter » leur buffle, comme les rameuses à Tam Coc…
Enfin, nous irons après voir le temple du roi Lê Dai Hanh, plus petit, pas encore restauré, donc plus décrépit, mais peut-être un peu plus mystérieux…
À l’intérieur, on retrouve la statue du roi Lê Hoan (au milieu), de la reine Duong Van Nga (à droite) et de leur fils aîné Lê Ngoa Trieu, (à gauche) - le troisième roi de la première dynastie des Lê.
A la fin de notre visite, sur l’esplanade avec la porte d’entrée dans le site nous avons la surprise de nous retrouver parmi des belles bovines rouges, pour preuve que nous sommes quand même dans un village réel et pas de pacotille. Quant à la petite vietnamienne qui nous souriait avec un sourire ultra-bright, elle était vraiment belle, c’est pour ça que nous l’avons tous photographié !
Toutes ses visites finies, nous prenons le bus pour aller manger et nous reposer. Cette fois ça sera l’hôtel Thuy Anh de Ninh Binh.
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